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L’avenir, se trouve dans les fractions mono-matériaux !

Du fait des normes de pureté de plus en plus strictes, les recycleurs cherchent à produire non plus des fractions de métaux en mélange, des fractions pures mieux valorisables.

23 septembre 2019

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Relèvement des normes de qualité des métaux recyclés ; réglementations nationales plus strictes sur la pureté des matériaux ; marchés mondiaux plus difficiles d'accès... Les installations de recyclage des métaux sont aujourd’hui confrontées à une série de difficultés pour atteindre la rentabilité. Les fermetures de marchés dues au durcissement des normes de qualité et à la faiblesse des infrastructures nationales de recyclage ont entraîné une accumulation de métaux chez les professionnels du recyclage, y compris de fractions métalliques déjà pré-triées.

Les excédents de matériaux ont fait chuter les prix du métal recyclé. « Au cours des 18 derniers mois, depuis la mise en œuvre du décret National Sword en Chine, les prix des produits métallurgiques en mélange comme le Zorba ont baissé », constate Eric Thurston, responsable des ventes de métaux pour TOMRA Sorting, Inc., au siège (Charlotte – Etats-Unis). Brian Gist, directeur des ventes mondiales de TOMRA Sorting, ajoute : « En conséquence, nous voyons bien l’augmentation, dans les installations de recyclage, de techniques de tri avancées avec du tri optique pour séparer les matériaux mélangés en mono-fractions. »

Même si ce n’est pas évident, certaines entreprises de recyclage voient dans le renforcement des normes de qualité, le moyen d’acquérir un avantage concurrentiel. Cela implique toutefois une modernisation de leurs équipements de tri. « Certains clients nous disent que les conditions du marché sont propices à la modernisation de leurs installations en vue de traiter l'abondante ferraille disponible en Amérique du Nord selon des normes de pureté plus élevées », constate Carlos Manchado Atienza, directeur régional Amériques de TOMRA Sorting.

Une entreprise qui souhaite trier les fractions métalliques a le choix entre plusieurs solutions. Prendre la mauvaise décision entre procédé voie humide et voie sèche peut avoir des conséquences coûteuses, selon le marché ciblé.

Tri légers / denses

Depuis des décennies, les récupérateurs de métaux utilisent le tri par flottation pour séparer les fractions de métaux denses comme le cuivre, le zinc et l’acier inoxydable et les fractions légères, telles que l’aluminium. Ce procédé est issu de l'industrie minière, où il est utilisé pour récupérer des métaux de valeur et des fractions de charbon.

A première vue, l'utilisation d'eau dans un solution de Ferro-silicium pour faire flotter ou couler les matériaux semble assez simple. Le procédé est connu de longue date, et le besoin d’investissement initial pour la construction d’une installation de tri par voie humide en fait une solution attractive pour certaines entreprises de récupération. Les coûts de démarrage d’une installation humide sont aussi inférieurs à ceux d’une installation de tri par voie sèche.

Cependant, ces économies initiales ont un coût à long terme. « Le prix du Ferro-silicium peut varier et passer de 1 600 à 1 900 dollars par tonne », calcule Eric Thurston. Brian Gist, qui a exploité une installation de ce type pendant des années, explique en outre qu'une usine correctement exploitée utilise le Ferro-silicium à un taux d'environ 2,5 à 3 kg par tonne de métal trié. «Cependant, la moyenne tourne plutôt à 8 à 9 kg par tonne de fraction fine métallique triée », dit-il.

Le Ferro-silicium crée la masse spécifique (SG) pour laquelle les fractions métalliques sont séparées en un produit léger ou lourd. L'objectif est de la maintenir entre 1,8 et 2,2 SG pour les matériaux légers flottants et entre 2,8 et 3,4 SG pour les produits lourds. Bien que cela semble simple, de nombreux facteurs affectent les valeurs de SG ciblées, notamment la nature des matériaux traités et la qualité de l'eau. « La stabilité est une bataille constante dans la gestion d'un process par voie humide, c’est ce qui rend difficile l'obtention d’un tri de qualité régulière et reproductible », poursuit Brian Gist. « Au fur et à mesure que le matériau est mis en flottation, des matériaux fins se déposent dans l'eau, et plus l'eau est sale, plus il faut ajouter de Ferro-silicium pour obtenir la masse spécifique appropriée pour trier les flocs légers ou lourds. » Eric Thurston et Brian Gist mettent tous deux en garde les recycleurs qui envisagent d’investir dans une installation par voie humide et leur rappellent les restrictions existant désormais sur le marché pour les produits triés. La flottation ne produira que des flocs légers (aluminium) et lourds. Si elles ne disposent pas également d’un procédé par voie sèche, les installations par voie humide ne peuvent plus trier les métaux lourds en mono-fractions telles que le cuivre, le zinc, l’acier inoxydable ou le plomb, ce qui réduit la capacité de l’installation à s’adapter aux conditions du marché.

L’installation par voie humide typique est configurée pour traiter jusqu'à 20 t/h de fractions métalliques. La stabilité de la masse spécifique et la taille des particules recyclées auront une influence sur ce rendement. Lorsque la masse spécifique devient instable et que la taille des particules diminue, le taux de production ralentit, chutant souvent jusqu’à 7 t/h. Les impuretés emprisonnées dans les interstices des déchets métalliques se mélangent au Ferro-silicium et se déposent dans les bassins, sur les filtres, dans les conduites et dans les pompes. Ce gâteau de filtration doit être éliminé du système et, selon le pays, il peut être classé comme déchet dangereux, ce qui rend son élimination plus difficile et plus coûteuse. Ces éléments, ainsi que la nécessité d'empêcher les réservoirs et les conduites de geler pendant l'hiver dans de nombreux pays, impliquent pour ce type d’installation une attention constante et des coûts d'exploitation importants sur le long terme. Ces coûts doivent être pris en compte lors du choix du type de procédé de tri pour séparer les fractions métalliques.

Tri optique avancé

Bien que leur existence sur le marché soit plus récente que celle des installations de tri par voie humide, des installations de recyclage des métaux utilisent le tri optique à sec depuis près de trois décennies. « Nous avons commencé à commercialiser nos équipements de tri optique en Amérique du Nord au début des années 90 », indique Manchado Atienza.

En plus des trieurs optiques, l’industrie des métaux utilise également des technologies à rayons X, électromagnétiques et laser pour séparer les fractions de métaux ferreux des non ferreux et des impuretés. A la place de l'eau, ce sont des jets d'air comprimé qui sont utilisées soit pour éjecter les impuretés détectées dans les matières premières et conserver le produit souhaité dans le flux (tri négatif), soit pour éjecter le produit et conserver les impuretés (tri positif.

Alors que le tri par voie humide ne permet qu’une séparation des flocs de produits légers ou lourds, la séparation par voie sèche va plus loin en permettant un tri en mono-fractions. « Le tri optique avancé sépare le cuivre, le nickel, l'acier inoxydable, le plomb et d'autres métaux contenus dans le flux de métaux mélangés tel que le Zorba, pour fournir un aluminium de qualité supérieure ainsi que d'autres produits en mono-fractions », explique Manchado Atienza.

Sur un marché où les matières en mélanges se vendent à bas prix, le tri à sec offre aux entreprises la flexibilité nécessaire pour s'adapter aux conditions du marché. « Le Zorba se vend actuellement à moins de 0,50 dollar la livre dans de nombreux pays, alors que le cuivre se vend à plus de 2 dollars la livre », déclare Eric Thurston. Les trieurs optiques permettent aux entreprises de moderniser leurs procédés de tri et d’extraire les fractions les plus précieuses pour répondre aux demandes du marché.

Les modifications apportées au circuit de tri se font rapidement grâce au logiciel de contrôle des machines. TOMRA a récemment lancé son système d’exploitation ACT, qui permet aux exploitants d’effectuer des ajustements simples sur le tri de tout un ensemble de produits, via un écran tactile. « Moins de deux semaines sont nécessaires pour apprendre à piloter une installation voie sèche », commente Eric Thurston, « A contrario, l’exploitation d’une installation humide est plus une forme d'art qui peut nécessiter jusqu'à 18 mois de formation avant que l’opérateur n’atteigne son efficacité maximale. »

Brian Gist explique qu’il est difficile d’apprendre comment optimiser la masse spécifique dans une installation humide pour récupérer un maximum de produit avec un minimum de floculant. « Si vous avez un bon opérateur sur un process humide, vous devez absolument le conserver, car il vous permettra d'économiser sur vos coûts d'exploitation », dit-il. « Tandis qu’avec les trieurs optiques, le logiciel offre des résultats cohérents et reproductibles d’un simple toucher de l’écran, ce qui facilite l’apprentissage et les opérations. »

Brian Gist précise également que les exploitants d’installations de traitement par voie humide sont tributaires en permanence de leur installation car ils doivent surveiller de près le processus de flottation. A l’inverse, de nouvelles technologies disponibles sur le marché, telles que TOMRA Insight, utilisent le cloud pour communiquer les données d’exploitation critiques aux entreprises utilisant des trieurs optiques, de sorte que le circuit de recyclage à sec peut être surveillé à distance.

Ceci dit, certains récupérateurs de métaux estiment quand même que les investissements initiaux plus importants, défavorisent le procédé de tri à sec. Eric Thurston soutient toutefois que les coûts d'exploitation à long terme liés à l'utilisation de trieurs optiques sont nettement inférieurs à ceux d’un procédé voie humide. « Les coûts d’exploitation sont jusqu’à 90 % inférieurs avec le tri à sec », explique-t-il, « c’est une des raisons pour lesquelles un grand récupérateur de métaux du Midwest a liquidé sa ligne de traitement par voie humide au profit d’un procédé voie sèche. De plus, la disponibilité des trieurs optiques est d'environ 95 % contre environ 75 % avec l’autre procédé. »

Historiquement, le tri des fractions fines de métaux, inférieures à 10 mm, était l’application pour laquelle la séparation par voie humide présentait un avantage décisif, car la résolution sur les équipements de tri optique ne permettait un tri efficace que pour les fractions supérieures à 10 mm. De récents progrès technologiques ont toutefois conduit au lancement, lors du salon Aluminium USA 2019 à Nashville, de l’offre TOMRA X-TRACT X6 Fines, bénéficiant de la technologie de tri à rayons X. « Cette machine nous permet de détecter et de trier des fractions fines métalliques 50 % plus petites qu’avant, et offre un taux de récupération de 95 %, voire plus », explique Eric Thurston.

La bonne combinaison

Eric Thurston propose une solution aux entreprises qui exploitent actuellement des installations voie humide et souhaitent pouvoir séparer les métaux mélangés en mono-fractions : un trieur optique complémentaire. Différentes technologies de tri à sec peuvent être ajoutées au procédé de tri par voie humide - avant ou après le tri humide.

« Contrairement à une installation humide, la technologie de tri à sec est modulaire et peut s’adapter aux besoins de l’exploitation », explique-t-il. « L’ajout d’un équipement de tri voie sèche à la fin du processus pour trier les mono-fractions peut être une opération rentable permettant à une entreprise de tirer parti des conditions du marché. »

Quel que soit leur choix, Brian Gist rappelle aux entreprises que la pureté du produit final doit être le critère primordial, étant donné les réglementations de plus en plus strictes. « La mise en œuvre du décret National Sword par la Chine, suivie par de nombreux marchés en Asie du Sud-Est, montre que les normes de pureté ne feront que se renforcer. Par conséquent, les récupérateurs de métaux doivent choisir la bonne technologie qui leur permettra non seulement de produire les fractions que l'entreprise pourra vendre sur le marché, mais également d’atteindre les niveaux de pureté requis. »