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Les exportations mondiales de déchets plastiques vont-elles reprendre un jour ?

Avec la multiplication des barrières à l’entrée apposées par les pays Asie du Sud-Est, les exportations mondiales sur les plastiques ont subi un véritable coup d’arrêt au cours des 12 derniers mois.

19 août 2019

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Des pays tels que la Chine, la Thaïlande, la Malaisie et l'Inde ont freiné d’un coup sur les importations de déchets plastiques et autres, mettant les pays exportateurs dans l‘embarras. Ce mouvement qui a entraîné une baisse drastique des exportations, a provoqué une accumulation de déchets plastiques dans des pays qui jusque-là les exportaient en masse, faute de disposer de l'infrastructure de traitement sur place. Toutefois, cela pourrait repartir. Les nouvelles réglementations sur le taux de recyclabilité des produits, ou sur l’usage obligatoire de matières premières secondaires, pourraient en effet contribuer à relancer le mouvement des exportations.

Explications….

 

L’impact de la politique chinoise

Sans la possibilité d'exporter leurs déchets plastiques, certains pays sont confrontés à de vraies difficultés, les déchets s'entassant littéralement devant les centres de tri. Les experts ont parlé d’une « crise mondiale des déchets plastiques ». Bien que la Chine accepte toujours certains containers, le niveau de pureté exigé est si élevé que la majorité des exportateurs considèrent relever d‘une interdiction de fait.

Ainsi, au Japon, un des plus gros exportateurs vers la Chine avant l’entrée en vigueur du décret dit « National Sword », l’industrie de recyclage et les incinérateurs n’ont pas la capacité pour absorber les volumes actuels. De même aux États-Unis, de plus en plus d‘entreprises n’ont d’autre choix que d’envoyer leurs déchets en décharge. Selon les dernières statistiques, les exportations de déchets plastiques du dernier semestre 2018 ont été inférieures de 30 % à l'année précédente, et la majorité des plastiques de qualité inférieure ont été purement et simplement mis en décharge. Les pays de l'UE ont également connu le même phénomène, avec à peine 2 millions de tonnes exportées sur le semestre, contre 3 millions avant.

Ces interdictions étaient censées obliger les gouvernements des pays exportateurs à améliorer leurs process et à créer de nouvelles infrastructures de recyclage, mais dans certains cas, elles ont plutôt eu l’effet inverse.

 

Une nouvelle approche des exportations

En même temps que sont arrivés les interdictions d’importer venues de Chine, les gouvernements du monde entier ont de leur côté pris des mesures pour mieux réguler leurs exportations de déchets. Lors de la 14e réunion de la Conférence des Parties à la Convention de Bâle (mai 2019), 186 pays ont convenu d'imposer de nouvelles restrictions pour contrôler les exportations de déchets plastiques. Proposé à l’origine par la Norvège en septembre 2018, le nouvel amendement qui a été voté, classe les plastiques en mélange dans la liste orange avec tous les autres matériaux faisant l’objet de "considérations spéciales" dans le cadre de l'annexe II de la Convention. Du fait de cet amendement, les pays exportateurs doivent maintenant obtenir la permission des pays importateurs de déchets avant toute expédition. Cela oblige par conséquent les exportateurs à avoir des déchets plastiques de pureté plus élevée, pour obtenir les autorisations.

Ainsi, ce récent amendement de la Convention de Bâle donne raison a posteriori aux nombreux pays importateurs qui avaient commencé à interdire les importations ou à placer des restrictions. En achetant du plastique de qualité et de pureté supérieures, ils peuvent efficacement le recycler ou le réutiliser, contrairement aux plastiques de faible pureté ou contaminés. Et cela oblige les pays exportateurs à utiliser des plastiques à base de matériau recyclé de qualité suffisante pour l’upcycling.

 

Relancer les exportations grâce aux réglementations sur la recyclabilité

Il existe un moyen pour les pays exportateurs de respecter les normes imposées à la fois par la Convention de Bâle et les pays importateurs : c’est d‘instaurer des réglementations sur la recyclabilité des matériaux, grâce auxquelles le niveau de pureté des déchets plastiques sera plus sévère.

Cela permet une approche plus circulaire de l‘économie, avec des matériaux réutilisés plutôt que jetés.

En rendant ce process obligatoire pour les plastiques, ces réglementations vont permettre unredémarrage des échanges mondiaux de plastiques : il ne s’agirait plus cette fois d’expédier au bout du monde des déchets inutilisables, mais bien un matériau de qualité ayant de la valeur.

Outre les ambitieux objectifs de recyclage fixés par les gouvernements, l'adoption d'une réglementation sur la recyclabilité est essentielle pour assurer le fonctionnement d‘une économie circulaire durable, capable de s'appuyer sur le bon fonctionnement des marchés d'exportation.

Des efforts sont déjà déployés dans ce sens. En Australie, des normes sur les emballages seront introduites d’ici 2025. 100 % des matériaux devront être réutilisables, compostables ou recyclables. Une action qui s’est quand même attirée la critique de ceux qui pensent que le gouvernement australien a été long à agir.

Un certain nombre d'États américains disposent quant à eux de réglementations sur la recyclabilité pour les nouveaux produits et les emballages. En Californie, un texte de loi a été proposé, selon lequel les emballages de boisson devraient être constitués de 75 % de plastique recyclé en 2030. Son application se ferait par étapes, 25 % d’ici 2025, 50 % en 2030, etc.

L'UE a pour sa part introduit une réglementation prévoyant au minimum 25 % de matériau recyclé pour les bouteilles PET d'ici 2025, et 30 % d'ici 2030. Une coalition de 34 entreprises, associations caritatives et associations professionnelles en a appelé aux instances européennes pour des normes plus strictes sur les emballages upcyclé.

L’Allemagne comme la France s’engagent également en faveur de l‘écoconception des emballages, en vue de les rendre réutilisables, recyclables ou 100 % compostables d’ici 2025. En Allemagne, la nouvelle loi sur les emballages est entrée en vigueur le 1er janvier 2019, remplaçant l'ordonnance de 1998. Les industriels et les distributeurs doivent désormais participer à un système d'élimination et de recyclage conforme à la réglementation sur la récupération et le recyclage des emballages. La loi fixe des quotas de recyclage allant jusqu‘à 90 % en 2022.

 

Un avenir durable

L‘ambition des gouvernements de faire appliquer des réglementations sur la recyclabilité est évidente. Toutefois, les efforts doivent porter sur la mise en œuvre opérationnelle pour en assurer le succès.

Grâce à des réglementations nationales efficaces sur la recyclabilité des emballages, les pays exportateurs pourront à nouveau recourir au marché mondial des déchets, le plastique étant alors d’une qualité et d’une pureté suffisantes pour être accepté par les pays importateurs.